vendredi 29 avril 2016

Cauchemar du Célibataire


Voilà,
le cauchemar du célibataire,
l'angoisse du bigot frustré
la terreur du séminariste contraint de changer de trottoir
la tentation du sadique obsédé
mais aussi
l'obscénité marchande en devanture
la pornographie ordinaire du petit commerce

jeudi 28 avril 2016

Les Arbres


Voilà,
sculptés par les vents
ils imitent la vague dans le bleu du ciel et s'abreuvent à la lumière du grand large
comme une prière ou comme un défi ils se tiennent vigilants au bord de l'abîme
sur le sentier humide par mégarde ton pied écrase une pauvre limace
des songes d'autrefois appareillent vers d'improbables rivages
tu n'es plus cet enfant qui courait droit-devant sur les chemins
insouciant les paumes ouvertes dans l'offrande du soleil
christianbobin sors de ce corps
(Linked with skywatch Friday)

mardi 26 avril 2016

Insoutenable Légèreté


Voilà,
au Centre Pompidou se tient en ce moment une exposition de photos sur les années quatre-vingts, intitulée "L'insoutenable légèreté". Elles furent en effet étranges et paradoxales ces années où, moururent tant d'amis et de connaissances alors que se propageait l'épidémie de Sida, et qui, pendant que s'entretenait ici l'illusion d'un socialisme à la française, virent triompher partout dans le monde le libéralisme économique et la financiarisation à outrance. Mais trente ans après je me souviens surtout, du choc et de l'inquiétude suscitées par la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, mot qui désigne aussi une plante amère, et qui apparaît dans la traduction russe de l'Apocalypse de Jean. D'ailleurs, la photo verte de Sandy Skoglund s'intitule "Radioactive cats". L'insoutenable légèreté, malheureusement, qualifie aussi le comportement de nos dirigeants à l'égard de la question nucléaire.

lundi 25 avril 2016

Soulagement (mais je ne dis pas non plus toute la vérité)


Voilà,
pourquoi devrais-je m'obliger à dire quelque chose. De toute façon ces billets, pour la plupart écrits longtemps à l'avance, ne prétendent pas coller à l'actualité qui, au demeurant, m'intéresse de moins en moins. Tout ça me lasse. Il y a trop de motifs d'indignation à vivre dans le monde tel qu'il se présente désormais. Bricoler des formes soulage, du moins pour un temps.

vendredi 22 avril 2016

Chez Paquita


Voilà,
Chez Paquita quand on est une fille, il faut être prudente et venir en pantalon plutôt qu'en robe, ou alors ne pas s'attarder près des livres empilés. Chez Paquita, il y a plein d'œuvres d'artistes russes. Longtemps Paquita n'a été qu'un nom exotique, celui d'une femme dont me parlait Pascal qui l'avait connue au début des années 80 lorsqu'il travaillait à l'Ambassade de France à Moscou. Elle possède désormais une galerie parisienne dévolue aux créateurs russes. Il faudrait que j'y retourne. Cette photo, je l'ai prise l'année dernière.  (The weekend in black and white

jeudi 21 avril 2016

Au dépourvu


Voilà,
le paradoxe est que je ne vois plus vraiment ce que je photographie. Je l'entrevois juste. Je ne perçois en fait qu'une partie du champ dont la profondeur m'échappe. Je ne saisis le relief que très approximativement. Il en a toujours été ainsi, même si désormais tout devient de plus en plus imprécis, non pas flou mais vague. Faire le point, et là je ne parle pas seulement de faire le point avec un appareil photo, non faire le point sur un visage ou un regard pendant une conversation, ou pour lire plusieurs pages d'affilée exige un intense et toujours plus difficile effort de concentration. A présent j'aperçois plus que je ne regarde ou ne distingue. Mon attention de plus en plus flottante n'opère que par intermittence et relève de fait plutôt de la distraction. Les choses sont là, d'accord, mais elles me parviennent plutôt comme une rémanence que comme une réelle apparition.
Parfois des genres de phosphènes (mais ils ne sont pas - du moins pas pour l'instant - aussi perturbants que les acouphènes peuvent l'être pour l'ouïe) se disséminent en de petits points brillants ou en de minuscules billes flottant entre regard et vision. Il arrive aussi que des sortes de filaments semblent glisser dans une substance aqueuse. C'est un peu embarrassant chez le boucher ou pendant une réunion professionnelle qui devient une sorte de dispositif à la Yayoi Kusama. Chose étrange, en rêve ce phénomène ne s'est encore jamais produit. Mais je sens bien que ça se modifie qu'il faut en profiter tant qu'il est encore temps. L'autre jour, dans le ciel, il m'a semblé qu'un oiseau se dédoublait. Sur un tableau de bord, je mélange les boutons, je ne reconnais plus les sigles, je ne mémorise plus les informations. Dans la salle de bains je confonds les étuis. Mais au fond, ce n'est peut-être pas simplement qu'une affaire d'usure des organes. Il se peut que cela soit aussi une disposition psychique pour me détourner de la réalité, la fuir. La transformer pour y trouver autre chose que ce que j'y vois et qui me semble souvent si tristement terne. Je peux encore m'émouvoir d'une belle lumière, d'un paysage, un détail peut me sauter aux yeux et prendre toute la place. Évidemment, je sais ce qui continue d'attirer mon regard dans les rues. De plus en plus souvent je pense au travail d'Evgen Bavcar, ce photographe aveugle. Peut-être faudrait-il que je m'intéresse d'un peu plus près à tout cela désormais, pour ne pas être pris au dépourvu. "Dépourvu", comme il me paraît soudait étrange ce mot dans ce contexte. Ça existe le verbe dépourvoir ? Faut que je vérifie.
(...)
Ben oui ça existe. La définition c'est "priver de ce qui est utile, indispensable". En fait c'est le contraire du verbe pourvoir dont la première définition est pour le Larousse "Donner quelque chose à quelqu'un, l'en doter, en parlant d'une puissance supérieure". Exemple : La nature l'a pourvu d'un physique agréable. Ouais bof. C'est vrai qu'il m'arrive parfois d'être beau gars quand je suis bien coiffé mais tout de même faut pas exagérer.

mardi 19 avril 2016

dimanche 17 avril 2016

Face aux Apparences



Voilà,
l'impossibilité de parler. Lui parfois si disert en certaines circonstances, si prompt à la conversation lorsque l'échange est organisé, cadré, en quelque sorte ritualisé, le voilà qui se heurte en d'autres moments (au téléphone surtout) à l'impossibilité de l'adresse. Le moindre coup de fil à passer lui paraît une épreuve insurmontable. Que l'on vienne à l'appeler,  malgré la solitude qui lui pèse, il ne se déplacera même pas vers l'appareil. Dans ces moments il voudrait totalement disparaître et même ne jamais avoir été. Souvent le gagne, lorsqu'il socialise, la pénible impression de jouer un rôle, de le surjouer même. C'est un effort terrible, même s'il n'en laisse rien paraître. L'enfant qu'il est resté n'a jamais été trop à l'aise dans son corps d'adulte. Alors il griffonne, dessine dans les marges. Les visages, les silhouettes qui viennent à lui sont ses compagnons clandestins, le peuple d'une région sauvage et fantôme où rien ne se dit, mais où dans le silence s'exprime cependant l'étonnement d'être là. 

vendredi 15 avril 2016

Galeries Lafayette de nuit


Voilà,
Ils sont précieux, rassérénants bien qu'ils te plongent dans un trouble indéfinissable, ces moments qui, en dépit de la maladie, du chagrin, des soucis d'argent, de la peur diffuse et sans objet précis qui plane sur l'ordinaire des jours, apparaissent comme chargés d'une densité particulière parce que tout semble soudain en équilibre, harmonieux et juste : la brise légère, les trilles subtiles des oiseaux, la lumière sur le paysage. Et c'est comme si tu étais au monde depuis toujours et pour toujours, indifférent et cependant accordé à l'état des choses. Comme si tout à coup tu n'étais plus matière, mais simplement une évanescente et fugitive trace d'éternité, une essence réduisant le monde à une illusion, un simple frôlement, à l'écho lointain d'un chant secret et à peine perceptible. Pourtant un jour, dépouillé de tous les hasards qui t'ont constitué, tu retourneras au mystère d'où tu as inexplicablement surgi. Tes possessions, tu les abandonneras à la vaste brocante ou furètent les vivants, et quelqu'un, pour quelques temps se souviendra encore du soir où tu t'es arrêté à cet endroit, et puis forcément finira bien par l'oublier. (The weekend in black and white)

mercredi 13 avril 2016

Hommage à Marcel Duchamp

Nus baisant près d'un escalier
 
Voilà,
"Ce chagrin des glandes qu'on appelle l'amour" (H-F Thiéfaine)
Oui bon la formule ne manque pas de style
Mais moi je suis un sentimental 

Énigmes


Voilà,
Est ce que j'avais déja peur au moment où j'ai pris la photo ? La peur était-elle en train de faire son lent travail ? Est-elle venue un peu plus tard dans l'après-midi sans que je ne m'en rende compte ? À la terrasse du café par exemple ? Pourquoi ai-je pris cet instant ? Qu'est ce qui m'a retenu dans ce cadre ? Ai-je reconnu dans cette attitude quelque chose qui faisait écho à ce que j'éprouvais sur le moment ? Il m'a semblé bien sûr que cela ferait une belle photo. Cela ne m'a pas traversé l'esprit mais j'y songe à présent que j'écris ces lignes, un jour viendra où il y aura une dernière photo. Plus tard l'après-midi tirait à sa fin, la panique m'avait saisi sur le boulevard où je n'étais pas venu depuis si longtemps et qui ressemble à un ghetto, puis dans un lieu de passage bondé à cette heure où des  visions d'explosion et de carnage m'ont affolé quelques minutes, alors que j'avançais hébété, à cause de la vue qui baisse (oui peut-être devrais-je changer mes verres). J'ai eu la nette sensation de n'être plus tout à fait de ce monde comme si quelque chose en moi se résignait. Parvenu à destination, j'ai un peu marché. Mon regard a été attiré par la modestie sauvage de ces deux là. J'étais encore capable de les apercevoir, de me rapprocher d'elles. C'était ça la vie. La vie intense et fragile. J'ai songé aux photos de Bill qui célèbre les grands horizons, mais aussi les mousses et les lichens et dont les photos sont un hymne permanent à la nature toujours changeante

lundi 11 avril 2016

Association d'Idées

Voilà,
pendant l'exposition des œuvres du Douanier Rousseau au musée d'Orsay
Je me suis rappelé que la dernière fois que j'y étais venu 
c'était pour l'exposition "images de la prostitution au XIX ème siècle"

samedi 9 avril 2016

Regarder Paris comme un touriste


Voilà,
une petite carte postale parisienne du jardin des Tuileries en ce début d''Avril frais et pluvieux pour remercier tous celles et ceux qui ont la gentillesse de me laisser des mots au bas de mes publications. Juste pour dire que ces témoignages constituent à chaque fois une heureuse surprise et qu'ils me touchent et me font plaisir. (Linked with skywatch friday)

vendredi 8 avril 2016

La Borne


Voilà,
m'importe plus ce que j'imagine et projette que ce que je vois vraiment. D'ailleurs apercevant ce lieu c'est l'image que cela pouvait éventuellement donner qui m'est apparue. Et puis c'est aussi une histoire de moment. Cette borne devant laquelle je passe tout les jours et souvent aussi la nuit, a pris une singulière densité à cause de l'état – ce fameux "Einstellung" qu'évoque Wim Wenders – dans lequel je me trouvais ce soir-là. Il me paraissait nécessaire de revendiquer mon appartenance au monde, fût-ce dans l'évocation d'une chose banale et sans grâce. Un instant, j'ai été tout entier dans ce cadre. Avec mon inquiétude. (Linked with the weekend in black and white)

jeudi 7 avril 2016

Au Bord d'un monde


Voilà,
tu te tenais au bord d'un monde qui te rappelait vaguement celui qu'il te faudrait – pensais-tu – bientôt quitter et qui n'était cependant pas celui où tu avais vécu. Au fond de ta poche de pantalon sur un papier froissé semblable à un ticket de théâtre était inscrit ton nom. C'était ton sésame pour cette barge sur laquelle tu étais supposé embarquer. Qu'elle fut amarrée sur l'autre rive te déconcertait. Moins cependant que ce ciel liquide où elle semblait flotter sans pour autant s'y refléter. Fallait-il que tu attendes ou devais-tu par tes propres moyens accéder à l'autre côté ? Tu pensais pourtant en avoir fini une bonne fois pour toutes avec les questions les décisions les choix les initiatives. Le souvenir lointain d'un voyage scolaire dans la vallée du Rhin passa comme une brume légère entre toi et le paysage. Peut-être après tout suffisait-il que tu restes ainsi à contempler ce qui s'offrait à ton regard. Et tu finirais par te dissiper toi aussi comme un nuage, sans même t'en rendre compte.

mercredi 6 avril 2016

Un brave idiot



Voilà,
sommeille aussi en moi un brave idiot pareil à un épouvantail
Il faut qu'il ait aussi sa chance celui-là, qu'on lui laisse le temps de se réveiller
qu'il fasse enfin ce que bon lui semble

mardi 5 avril 2016

Autoportrait en déconfiture


Voilà,
c'est assez joli ce que j'ai entendu ce matin à la radio, cet extrait de Bergson dans l'Energie spirituelle : "Chacun de nous est un corps, soumis aux mêmes lois que toutes les autres portions de matière. Si on le pousse, il avance; si on le tire, il recule; si on le soulève et qu'on l'abandonne, il retombe. Mais, à côté de ces mouvements qui sont provoqués mécaniquement par une cause extérieure, il en est d'autres qui semblent venir du dedans et qui tranchent sur les précédents par leur caractère imprévu : on les appelle « volontaires ». Quelle en est la cause ? C'est ce que chacun de nous désigne par les mots « je » ou « moi ». Et qu'est-ce que le moi ? Quelque chose qui paraît, à tort ou à raison, déborder de toutes parts le corps qui y est joint, le dépasser dans l'espace aussi bien que dans le temps. Dans l'espace d'abord, car le corps de chacun de nous s'arrête aux contours précis qui le limitent, tandis que par notre faculté de percevoir, et plus particulièrement de voir, nous rayonnons bien au-delà de notre corps : nous allons jusqu'aux étoiles. Dans le temps ensuite, car le corps est matière, la matière est dans le présent, et, s'il est vrai que le passé y laisse des traces, ce ne sont des traces de passé que pour une conscience qui les aperçoit et qui interprète ce qu'elle aperçoit à la lumière de ce qu'elle se remémore : la conscience, elle, retient ce passé, l'enroule sur lui-même au fur et à mesure que le temps se déroule, et prépare avec lui un avenir qu'elle contribuera à créer." J'ai repensé à Philippe qui l'aimait beaucoup. Je me suis souvenu de l'odeur des vieux livres, de ce qui se décompose et se recompose, et du portrait de Dorian Gray peint par Ivan Albright que j'avais découvert dans ma jeunesse dans un ouvrage consacré à L'Art fantastique, à tous ces hasards qui m'ont constitué. J'ai songé que c'était déjà pas mal d'être arrivé jusque là sans trop d'encombre, et que je ferai au mieux pour m'accommoder de la suite et qu'il fallait fabriquer, fabriquer encore, expérimenter, imaginer, traficoter bidouiller que c'était là ma seule aptitude, que je n'étais plus bon qu'à ça, et qu'elle ne tenait qu'à ça mon "énergie spirituelle", que c'était un grand mystère pour moi que je sois devenu ça, que j'ai pu en partie échapper à toute cette bêtise soldatesque qui m'avait engendré et éduqué, et limiter les dégâts, et que tout de même, maintenant, un peu de campagne me ferait le plus grand bien. Quoiqu'il en soit, il va tout de même bien falloir réfléchir un peu sérieusement à cette question de matière. 
shared with friday face off

lundi 4 avril 2016

La Promenade



Voilà,
"La promenade [...] m’est indispensable pour me donner de la vivacité et maintenir mes liens avec le monde, sans l’expérience sensible duquel je ne pourrais ni écrire la moitié de la première lettre d’une ligne, ni rédiger un poème, en vers ou en prose. Sans la promenade, je serais mort et j’aurais été contraint depuis longtemps d’abandonner mon métier, que j’aime passionnément. Sans promenade et collecte de faits, je serais incapable d’écrire le moindre compte rendu, ni davantage un article, sans parler d’écrire une nouvelle. Sans promenade, je ne pourrais recueillir ni études ni observations." (Robert Walser)

vendredi 1 avril 2016

L'Enseigne

 

Voilà,
Ce qui reste d'enfance, et dont on ne peut tout à fait se déprendre semble parfois s'insinuer dans les paysages. Une fenêtre toujours close et ses volets défraîchis, une enseigne désuète débusquée au hasard d'une promenade, ou bien encore tout un fouillis de jardin abandonné, une arrière-cour encombrée que les années ont transformée en débarras, l'ombre portée d'un arbre sur une façade décrépite ravivent les souvenirs de regards jetés en d'autres temps sur d'autres lieux. D'une multitude de menus détails que la mémoire a sédimentés, émerge alors une vie fantôme et inexprimée faites de toutes les choses perdues parce qu'inaccomplies : nos actes manqués, nos moments d'absence, nos vagabondages rêvés (Linked with the weekend in black and white)

Publications les plus consultėes cette année